Cette affection existe dans tous les pays du monde, quels
que soient le sexe et le milieu. Elle est cependant trois à quatre fois plus
fréquente chez la femme, probablement en raison de l'imprégnation cyclique
oestrogénique qui favorise son excitabilité neuromusculaire. Elle touche
surtout l'adulte jeune, mais se rencontre aussi chez l'enfant, voire le bébé, et
chez les personnes d'âge mûr - elle se raréfie cependant après 60 ans. L'enfant
spasmophile a un comportement particulier, qui se traduit notamment par une
irritabilité, des cauchemars, des rêvasseries et une instabilité psychomotrice.
Environ un tiers des spasmophiles sont des hommes jeunes, les autres sont des
femmes de tout âge dont les troubles s'estompent après la ménopause. La
spasmophilie a volontiers un caractère familial, dont la transmission se fait
par les femmes. L'enfant d'une personne spasmophile a deux risques sur trois de
l'être à son tour.
Cette affection peut rester latente et muette pendant des années
: il s'agit de la période « compensée ». La décompensation, provoquant
l'apparition des troubles, se révèle presque toujours à la suite d'un événement
déclencheur « traumatisant ». Ce terme vague doit être entendu dans un sens
très large, psychoaffectif ou physique : cela va des chocs moraux - émotions
vives, situation conflictuelle ou surmenage - à des agressions physiques tels
un accident ou une intervention chirurgicale, même bénigne. Le facteur déclenchant
peut être d'ordre physiologique, comme une croissance rapide, une grossesse ou
l'allaitement, des diarrhées chroniques, des perturbations de l'alimentation,
etc. Dans certains cas, la prise d'un contraceptif oral n'est certainement pas
étrangère à l'aggravation des symptômes.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Les troubles spasmophiliques varient en fonction des
saisons, et tous les spasmophiles connaissent les aggravations du printemps et
de l'automne. De même, dans la vie des spasmophiles existent des périodes
d'accalmie où pendant des années les troubles s'amenuisent et souvent
disparaissent. Ils sont cependant susceptibles de ressurgir à l'occasion d'une
décompensation ultérieure consécutive à un facteur déclencheur.
Il n'y a pas de définition officielle de la spasmophilie,
son nom même semble étrange puisqu'il signifie « ami des spasmes ». Il vaudrait
mieux parler de « spasmopathie » car il s'agit plutôt de la « maladie des
spasmes ». Je la définis comme un syndrome, ou ensemble de signes,
neurovégétatif fondé sur l'hyperexcitabilité neuromusculaire due au
déséquilibre entre l'orthosympathique et le parasympathique. Le système nerveux
sympathique fait partie de notre système nerveux. On dit qu'il est « autonome »
car il fonctionne de manière involontaire. Ce système est indispensable à de nombreuses
activités physiologiques de notre organisme. C'est lui qui, par exemple,
provoque l'accélération de vos pulsations cardiaques ou vous fait transpirer
lors d'une situation de stress. Mais ce système nerveux sympathique est, comme d'autres
mécanismes du corps humain, en équilibre avec un autre système, le système
nerveux parasympathique. Les personnes qui souffrent d'un dérèglement de ce
système sont plus réactives que d'autres aux situations de stress. Les personnes
plus calmes bénéficient généralement d'un système parasympathique mieux
équilibré, ou ont appris à se contrôler par des techniques comme la méditation,
le yoga, etc. L'orthosympathique conditionne l'accélération et la dilatation des
vaisseaux, des viscères, etc. Le parasympathique, lui, en régule la
rétractation et le ralentissement. La vie est faite d'une alternance
d'ouvertures et de fermetures, d'accélérations et de ralentissements
(contractions du cœur, rythme respiratoire, fonctionnement du tube digestif,
etc.). Normalement l'action des deux systèmes s'équilibre, et tout va bien. Mais
si l'un prend le pas sur l'autre, des troubles apparaissent. Si c'est
l'orthosympathique qui prédomine par exemple, le cœur s'accélère, le rythme
respiratoire augmente, une diarrhée survient. À l'inverse, si c'est le
parasympathique qui l'emporte, apparaissent un ralentissement des rythmes cardiaques
et des intestins.
Ces phénomènes concernent l'ensemble des muscles involontaires
- muscles lisses présents dans la paroi de nombreux organes (utérus, intestin,
bronche, vésicule, vaisseaux sanguins, etc.) dont la contraction est
involontaire ou autonome. Cela explique que des groupes musculaires situés dans
le dos, entre les côtes, sur les parois abdominales ou les cuisses puissent
être concernés, d'où des courbatures, des douleurs sans cause, etc.
L'hyperexcitabilité neuromusculaire signifie que la
jonction entre les filets nerveux (fibres qui sont le prolongement des neurones)
et les fibres musculaires (là où passe le « courant ») est plus sensible. Il
faut donc un plus petit « courant électrique » pour provoquer la contraction du
muscle. Cet abaissement excessif du seuil d'excitabilité provoque des contractions
spontanées des muscles involontaires, et par .conséquent les troubles dont se
plaignent les spasmophiles. Cette facilitation est due à une distorsion, à une
mauvaise utilisation des ions calcium et magnésium au niveau de la plaque
neuromusculaire. Le plus fréquemment, c'est le manque de magnésium qui est en
cause, mais il peut aussi être associé à un déficit en calcium.
L'électromyogramme est un examen électrique indolore qui
permet de confirmer cette hyperexcitabilité neuromusculaire et de la mesurer en
suivant une cotation que les Drs Belaiche, Floresco et moi-même avons mise au
point il y a plus de vingt ans.
La nicotine, ennemi des spasmophiles
Un des plus puissants parasympathicotoniques (qui renforce
l'action du parasympathique) est la nicotine contenue dans le tabac. Donc, si
vous êtes susceptible de souffrir de spasmophilie, la cigarette augmente vos
troubles puisqu'elle dérègle le système nerveux autonome. Finissez-en une fois
pour toutes avec cette mauvaise habitude.